Tony Ingrao ET le prieuré de Saint-Symphorien

Extrait d’un passage du livre
« Le prieuré de Saint-Symphorien, une histoire de mille ans »

« Different needs, different translations »

C’est ce qui pourrait définir l’état d’esprit de Tony Ingrao dont les nombreuses réalisations à travers le monde nous frappent par leur diversité et leur originalité. Marqué par le style du Grand Siècle, les réalisations d’architectes contemporains tels que Tadao Ando ou Franck Gehry, mais aussi imprégné de culture européenne (il fait partie de la famille du résistant italien Pietro Ingrao, un des fondateurs du PCI), Tony Ingrao a débuté sa carrière en revenant sur les pas de son enfance, à Bonnieux, où sa grand-mère maternelle tenait une épicerie.

A la fin de ses études d’architecture, il se rend à Paris au début des années 1980 pour étudier les Beaux-Arts et y rencontre Daniel Vial qui va lui permettre de réaliser son tout premier projet architectural. Il se souvient avoir été frappé par la lumière de la Provence, qui inspira tant d’artistes, peintres et écrivains marqués par son éclat presque aveuglant et ses humeurs changeantes. Se promener dans le Luberon fut pour lui une véritable expérience sensorielle. Le soleil, la sécheresse de cette terre mêlée à la pierre calcaire, les parfums des lavandes, des fleurs d’amandier, le murmure du vent dans les cyprès, les oliviers… tous ces éléments faisaient partie d’un monde enchanteur qui subjuguait le jeune architecte. Au milieu de cet écrin, au détour d’une route serpentant à flanc de roc, la vallée de l’Aiguebrun s’ouvrait, tournoyait, jusqu’à ce qu’il aperçoive, se dressant, droite vers le ciel, la tour du Prieuré, semblant échapper à l’impact du temps.

« J’ai été frappé par l’énergie qui se dégageait de ce monument, c’était pour moi un projet hors du commun, je voulais avant tout respecter ce monument, la pureté de ses lignes, son aspect minéral »

Tony Ingrao opta pour un aménagement intérieur épuré, préservant l’atmosphère monacale, dont les matériaux proviendraient directement de la région (pigments naturels des terres de Roussillon, pierres de taille récupérées directement sur place, tomettes d’Apt). Il fallait avant toute chose, pour ne pas dénaturer le monument, opter pour une décoration sobre, mêlant la pierre et le bois (buffet provençal, lit à baldaquin en bois provenant d’un monastère non loin d’Avignon, dallage de pierres anciennes). Le jardin fut principalement constitué de plantes et arbres de la région (cyprès, oliviers, thym, romarin, lavande), l’aspect minéral fut également mis en avant (murs et escaliers de pierre).

« Je garde un souvenir encore très présent du Prieuré qui était pour moi un véritable défi à relever : celui de transformer un prieuré médiéval en un lieu accueillant, chaleureux, où l’on peut se retirer du monde »